Love me tender. C'est à cette chanson que l'air joué par le pianiste du bar, faisait penser Tatiana. En réalité, je crois qu'il n'y avait aucun rapport entre les deux. Quoi qu'il en soit, elle était assise là, toute seule à une table assez proche de la scène. C'était calme ici. L'ambiance de la soirée était chaude, presque cosy. La première fois que Tatiana était entrée ici, c'était pour un rendez-vous galant. Un jeune homme qu'elle avait rencontré comme ça, dans le milieu de la mode. Ils avaient échangé leur numéro et s'était vus quelques fois. Amicalement, bien sur, mais le courant n'était pas passé. Enfin, pas assez pour entretenir une quelconque relation intime. Dès qu'elle eut mis un pied dans cette petite salle, elle s'était vue dans les années 50, avec une belle robe de soirée, quelques plumes et des perles de valeur un peu partout autour du cou, et de la tête, sur une coiffure montante, mettant en valeur ses boucles blondes. Oui, elle n'aurait pas eu les cheveux roses, à cette époque. Une musique un peu jazzy, du Martini et des olives.
C'est d'ailleurs ce qu'elle sirotait en ce moment même, un Martini. Elle se laissait porter par les diverses vagues de sons qui embaumaient la pièce. Entre la musique, cristalline, presque parfaitement jouée, les chuchotements des clients et les tintements de verres, dans le bar. Le cocktail parfait pour passer une soirée agréable.

Vous vous demandez probablement pourquoi est-ce qu'une jolie jeune fille comme elle passait des soirées seule au bar ? Certains auraient pu croire à une sorte... d'alcoolique désespérée. Mais en fait, loin de là l'idée.
Premièrement, en sortant de cure de désintoxication, ses psychologues lui avaient dressé une liste de choses à faire, afin d'éloigner certaines tentations. Dans cette liste, passer quelques moments seule, en profitant pleinement de ce qu'elle aimait. Et Tatiana aimait plusieurs choses, qu'elle avait regroupées ce soir. La musique, l'alcool (à petite dose), l'ambiance tamisée, les beaux garçons.
En effet, depuis le début, en plus d'écouter avec attention les notes tapées par l'artiste, elle avait bien longuement détaillé son physique.
Elle le trouvait plutôt pas mal, bien bâtit, des expressions quelques peu enfantines par moment, un sourire séduisant et tout l'air d'avoir une personnalité bien à lui, une certaine prestance. Pour monter sur scène, en même temps...

En dehors des goûts personnels de la jeune femme, elle l'observait aussi dans un but précis. Elle le voyait très bien poser pour sa ligne de vêtements. Elle avait déjà quelques mannequins originaux, mais elle manquait de personnel masculin. Elle ne comprenait pas la réticence des hommes à venir porter quelques fringues et prendre deux ou trois clichés. Certes, c'était sa passion, à elle. Mais il y avait des hommes tellement faits pour ce métier, c'était du gâchis de les laisser salir leurs mains sur des chantiers boueux.
« C'est pour les tapettes » avait prétendu Kurtis, un jour alors que Tatiana lui parlait de ses projets d'avenir. Kurtis était plutôt beau garçon, quand il n'était pas accoutré de toutes ses breloques et ses vieux jeans troués. Il aurait pu faire quelque chose de cette belle gueule et de ce corps sec et bien tracé.

Tat' se redressa et prit quelques cacahuètes dans sa main. Elle ne put s'empêcher de penser à tous les microbes qu'elle allait ingurgiter, rien qu'avec ces quelques fruits secs. Elle hocha inconsciemment la tête et les avala, reposant le regard sur le pianiste. La mélodie prit fin, et elle prit soin de l'applaudir, un sourire serein au bout des lèvres.

Depuis quelques temps, j'arrivais assez facilement à trouver du boulot en tant que pianiste dans des bars de Thunder Bay. Il y a quelques semaines j'avais pu me produire au près d'une vingtaine de vieux snob et je devais avouer que pour le salaire que j'avais reçu... J'étais prêt à prendre ma retraite de livreur de pizza pour me consacrer uniquement au piano. Malheureusement, les salaires variaient énormément d'un établissement à l'autre. Tout comme la clientèle d'ailleurs... Mais ça je n'allais pas m'en plaindre. Après une bonne répétition au domicile familial, je m'en allais direction le Java Hut. Je n'y avais encore jamais mis les pieds depuis mon arrivée à Thunder Bay. Certes mon boulot de livreur m'avais permit de connaître un peu mieux la ville mais le centre ville restait encore un total mystère pour moi. J'arrivais à destination sans trop de difficulté. Ces derniers temps la neige n'était pas très présente et la conduite se faisait plus aisément. Ce soir je n'étais même pas certain d'être payer. Le directeur du bar était resté très vague dans ces conditions. Si j'avais bien compris, je serais payé uniquement si mes mélodies ne passaient pas inaperçues. Autant dire que je devais gérer. J'avais besoin d'argent. D'une part parce que vivre sans argent est toujours difficile mais également parce que je devais absolument refaire mon tatouage représentant la tête de loup sur mon bras droit.

Setlist : Butterfles & Hurricanes, Sunburn, Ruled By Secrecy, Feeling Good : autrement dit, quelques morceaux du groupe anglais Muse. Je ne chante pas. Je ne préfère pas reprendre la voix ensorcelante de Matthew Bellamy. Suivirent Bohemian Rhapsody, Somebody to love, You and I ou plus clairement des classiques de Queen. Et pour finir en beauté, un mélange de Kean, Pink Floyd et un peu tous les morceaux que j'appréciais dans lesquels il y avait du clavier. La fin de mon petit concerto était une totale improvisation ce qui devait se ressentir fortement, mais qu'importe. Ça avait l'air de plaire. Ou du moins, ça avait l'air de lui plaire à elle. Cette fille assise non loin de la scène avec son look extravagant. Je souriais un peu plus chaque fois que je sentais un regard se poser sur moi.

Le concert touchait à sa fin. Je me levais et laissais la scène à un guitariste aux bras tatoué. Si l'on avait tendance à dire que j'avais des tatouages, ce n'était rien comparé aux siens. Quelques applaudissements retentirent, ce qui me fit le plus grand bien. Qui sait... Peut-être allais-je être payé ? J'observais furtivement l'ensemble de la salle. Ça n'était pas bondé mais il y avait quand même beaucoup de monde. un signe du barman me fit comprendre que je devais m'avancer pour avoir ma récompense. Mon sourire s’agrandissait bien que je tentais de rester professionnel. "Tiens, voilà ta paye ! On a eut 1/4 de recette en plus qu'en temps normal." Je pris les quelques billets qu'il me donnait et le remerciait d'un signe de tête. Cassidy ou comment gagner sa soirée en faisant quelque chose qui nous plais. J'étais content de mes bénéfices et pour la peine commanda à boire à mon tour. Accoudé au bar je demandais un Whisky/Red Bull. Je pouvais bien me le permettre après tout. Autant rester ici et passer une bonne soirée plutôt que de rentrer chez moi pour jouer à GTA et me faire pourrir la vie par ma demie soeur. En parlant de bonne soirée, je remarquais à nouveau la belle jeune femme au look qui me plait bien tant par son originalité que par son visage d'ange. Peut-être que cette soirée allait se solder par une nouvelle rencontre. Dans le fond, je ne demandais que cela.

Le sourire satisfait du jeune garçon annonça la fin du concert. Tatiana patienta encore quelques minutes, afin de voir si quelque chose d'autre allait arriver. Discours, rappel, animation, ou autre concert. Visiblement pas, puisque le pianiste était hors de sa vue et que la musique qui se diffusait à présent dans la pièce provenait des petits baffles accrochés un peu dans tous les coins de la salle.
La jeune femme jeta sa crinière rose en arrière lorsque le serveur lui apporta un nouveau verre de Martini, reprenant la coupe vide au passage. Elle lui sourit en le remerciant, lui laissant quelques pièces dans une coupole. Le compte, plus un pourboire généreux.
Son regard se dirigea instantanément sur le bar. Là, elle aperçu à nouveau le musicien qu'elle avait pris plaisir à écouter (et à regarder) toute la soirée. Elle se leva de sa chaise, qu'elle remit en place en la soulevant, non en la traînant. Malgré le passé douloureux de Tatiana, elle n'en oubliait pas pour autant les bonnes manières que sa famille lui avait inculquées.

Ce soir, elle s'était vêtue d'une robe assez sobre. Enfin... C'est subjectif, bien sur, car tout le monde ici avait remarqué ce qu'elle portait. Mais disons que pour une fois, elle avait opté pour des couleurs neutres, à la limite du fade. Cette robe, elle l'avait réalisée elle-même. Elle était sortie de son petit esprit une nuit d'insomnie. Et comme chaque fois qu'elle ne peut dormir, Tatiana dessine. C'est un des moyens thérapeutiques qu'elle a trouvé pour éviter de penser à la drogue ou aux tentations contre lesquelles elle se bat depuis quelques années. Le tissu était fin et brillant. De couleur gris perle, cela lui descendait jusqu'aux pieds. Pieds que l'on ne voyait même plus, à vrai dire. Elle avait choisi une matière un peu froissée, qui donnait une impression de « négligé », de « pas repassé ». Bien que le tissu soit déjà brillant d'origine, elle y avait avait parsemé une sorte de pluie de paillettes, qui reflétaient parfaitement les lumières du lieu. Ainsi, de sa taille à ses chevilles, une cascade éblouissante s'exposait aux yeux de quiconque la regardait.
Au dessus de la taille, toute la partie buste donc, était moulante, comparable à un bustier. Cet élément de la tenue était différent du reste. Tissu élastique, matière « grattante », mais néanmoins assortie au reste, autant dans la couleur que dans la brillance. La jeune créatrice y avait incorporé ces espèce de petits fils brillants, qui vous piquent la peau si vous le mettez à peau nue. Le décolleté était plutôt plongeant, mais rien de choquant à priori puisque la nature n'avait pas doté Tat' d'une poitrine très proéminente. De fine bretelles soutenaient le tout, laissant ainsi ses épaules blanches dénudées à la vue de tous. Cependant, la demoiselle avait tout de même embarqué un voile assorti, afin de se couvrir en cas de courant d'air. Ce voile, elle le passait uniquement autour de sa taille, revenant sur ses avant bras, gracieusement. Comme chaussures, elle avait choisi des hauts talons gris, rien de très extravagant, de plus, on ne les voyait même pas. Ses cheveux étaient lâchés et bouclés, juste décorés d'un tour de tête perlé. Un fin collier et quelques bracelets, de jolies boucles d'oreilles « imitation diamant » et cela avait suffit à faire d'elle une reine d'un soir.

C'est donc le Martini à la main qu'elle se leva et prit la direction du bar. Elle était bien déterminée à aller discuter quelques minutes avec le beau jeune homme qui l'intriguait tant. Elle n'allait pas faire un foin, non, elle allait simplement lui proposer, s'il le voulait, de poser de temps à autres, selon son emploi du temps, son envie. Sans oublier que ce petit service, il ne lui rendrait pas gratuitement. Et bien qu'elle ignorait tout de lui, qu'elle ne savait pas s'il vivait de la musique, elle était persuadée qu'un petit coup de pouce pour arrondir ses fins de mois ne lui ferait aucun mal. Oui, les artistes, elle connaît. Ce sont les premiers à galérer s'ils veulent vivre de leur passion. Et si ce gars là était musicien à plein temps, aussi bon soit-il, il avait sûrement connu la peur de ne pas pouvoir s'offrir un repas convenable quelques jours avant sa paie.

Ses pas talonnés retentirent au milieu du brouhaha discret, elle posa une main sur le comptoir et afficha son plus joli sourire, les yeux posés sur le visage de son interlocuteur.

- Bonsoir, dit-elle d'une voix douce avant de poser son verre, libérant ainsi son autre main, au cas où on voudrait la lui serrer.

La première chose que Tatiana fit, involontairement, eut été de se concentrer afin de ressentir une quelconque douleur provenant du jeune homme. Pour rappel, Tatiana fait partie de ces personnes ayant hérité d'un pouvoir après l'orage du 30 juillet. Elle peut connaître tous les maux des personnes autour d'elle, sans pour autant les ressentir dans son propre corps.. Elle a encore du mal à le gérer, il lui arrive trop souvent de ressentir des choses qu'elle ne veut pas. Elle aimerait pouvoir se centrer sur une personne en particulier, ça lui ferait un gain d'énergie énorme.

Rien à signaler, étrange. Même pas un mal de tête, une pression désagréable quelque part, même pas un coup bleu un peu douloureux. Peut-être qu'elle pourrait enfin se concentrer sur ce qu'on lui raconterait ce soir, au lieu de lutter péniblement contre ses propres ressentis. De plus, elle savait fort bien que tout le monde n'avait pas hérité d'un don, que certains n'étaient pas présent le soir de l'orage, d'autres qui n'étaient même pas au courant, ou simplement, qui n'y croyaient pas et qui prenaient les victimes pour de vieux fous. Elle n'aurait pas à sourire faussement, à éviter certains sujets de conversation, puisqu'ils n'arriveront même pas sur le tapis... Quoi que, on n'est jamais à l'abris.

Mon Whisky/Red Bull fut servit pas un serveur qui semblait avoir un air plutôt amical. L'espace d'un instant, j'avais l'impression de me retrouver à Liverpool. Les regards amicaux de la part des barmans étaient plutôt rares. Ils étaient en général plus sévères et parfois même surveillaient tes consommation : ce dont j'avais horreur. Peut-être était-ce parce que j'avais permis au bar de gagner un peu plus de client ce soit, ou du moins, d'avoir retenu leur attention et les avoir fait consommés. Je n'en avais pas la moindre idée. Le fait est qu'il était tout juste 23 heures et que la soirée s'annonçait très bien. Je remercia le barman que j'avais surnommé Bob à défaut de savoir son vrai prénom.
Pour ce soir, j'avais opté pour des vêtements légers. Pas trop non plus. Je connaissais ma résistance au froid Canadien et lorsque j'avais vu le givre sur les vitres des voitures depuis ma fenêtre, j’avais pris des précautions. Ainsi je portais probablement les vêtements les plus banals que j'avais pu trouver dans mon armoire. Un jean noir, serré mais pas trop non plus. Depuis que j'avais lu comme quoi la cigarette et le port de jean serré entraînaient l'impuissance temporaire chez les hommes, je faisais attention. Je ne comptais pas arrêter de fumer mais je pouvais faire un effort sur les pantalons. J'étais resté un moment indécis face à mes diverses chemises et t-shirt et finalement choisis de porter une marinière à manches longues. Je cachais mes précieux tatouages mais qu'importe... je n'étais pas prêt de les montrer alors que le thermomètre affichait -21 à l’extérieur.

Je commençais à prendre une gorgée de mon ambroisie et m'en délectais chaque fraction de secondes. C'était un vraie délice ! Je n'aurais pu imaginer une scène encore meilleure, pourtant c'est ce qui se produisit. Je me sentais observé mais attendais de finir mon verre avant de me retourner. Bonsoir dit-elle d'une voix tout à fait onctueuse. C'était elle. La fille que j'avais observé lorsque j'étais sur la scène. Ses cheveux roses bonbons et son air angélique étaient encore plus beaux à présent qu'elle n'était plus qu'à quelques centimètres de moi. J'étais étonné qu'elle vienne vers moi, je ne pensais pas me faire accoster. En général c'était l'inverse qui se produisait. Je me pointais avec mes blagues de dragueurs à deux francs et parfois tout se passait bien. Son large sourire laissant apparaitre de belles dents blanches me laissait sous le charme. "Bon allé, essaye de ne pas tout foirer Cass !"

Et dans mon élan toujours de mauvaise drague, je lui pris la main qu'elle venait de libérer pour y déposer un baiser. Un baise main, quel cliché ! Mais après tout, c'était mes réflexes d'anglais trop bien élevés qui remontait.
"Bonsoir..." déclarais-je à mon tour plongeant mon regard dans le sien. "Que me vaux cet honneur, tu as aimé ma courte prestation ?" En effet finalement cette soirée s'anonçait bien. Je remarquais en jetant un coup d'oeil furtif qu'il y en avait plus d'un qui admirait la belle inconnue qui venait de m'accoster. C'était impressionnant comme d'un seul coup, mon égo se sentait bien ! "Je suis Cassidy" déclarais-je finalement. Tentant de masqué mon accent Ecossais handicapant du mieux que je pouvais.

Les lèvres du jeune homme se posèrent sur la main de Tatiana. Elle en fut tout d'abord surprise, puis flattée. Elle ne se souvenait pas que quiconque, un jour, lui ait embrassé la main. Comme si c'était une princesse. Un fin sourire en coin se posa sur ses lèvres, délicatement, comme une plume virevoltant de nulle part, tournoyant sur elle même avant de frôler le sol pour de s'y poser.

- Bonsoir...Que me vaut cet honneur, tu as aimé ma courte prestation ?

Quelle question, bien sur qu'elle avait aimé. Elle but une gorgée de son Martini avant de répondre, toujours sur un ton doux et calme.

- J'ai beaucoup aimé, en effet. J'adore la musique, et la tienne a su m'emporter. Je te félicite.

Un petit rire s'échappa des lèvres de la jeune fille, son regard se portant derrière le musicien. Quelques personnes étaient au bar, discutant de choses et d'autres, sans forcément prêter attention à eux, ni à ce qu'il se passait autour. Néanmoins, elle avait senti un regard ou l'autre peser sur elle en passant. Rien d'alarmant, habituel. Et peu importe les jugements que ces personnes avaient portés sur elle, positif ou non, elle n'en avait pas grand chose à faire. Elle s'était prouvée assez de choses à elle-même pour ne plus en avoir avoir à prouver aux autres.

- Je suis Cassidy.

Tat' cru remarquer un petit accent, elle ne savait pas d'où. En même temps, elle non plus ne venait pas d'ici, donc l'accent américain devait primer. Ceci dit, les Canadiens, eux aussi, avaient un accent particulier auquel elle avait un peu de mal à se faire, encore aujourd'hui. Elle ne tarderait pas à savoir d'où il venait, elle ne comptait pas s'enfuir après ces quelques mots, et s'ils venaient à se revoir par la suite, elle en apprendrait encore davantage.

- Enchantée, Cassidy. Je m'appelle Tatiana. Tatiana Cuplle.

Elle marqua un temps d'arrêt avant de reprendre la parole. Elle ne voulait pas se lisser distraire au risque d'oublier la raison de sa venue.

- En fait, je t'ai beaucoup observé durant le concert. Et du coup, j'ai quelque chose à te proposer. Mais laisses-moi te toucher un mot là dessus, que tu comprennes mieux.

Elle saisit son sac microscopique et en tira une petite carte de visite, à son nom. Carte qui promotionnait son travail, bien évidemment. Une carte en carton brillant, noire et rose.


« Cuplle's Clothing »
Tatiana Cuplle – styliste
807 545-982
Ellipse avenue, 421
Thunder Bay.

- Voici ma carte. Je suis styliste. Je ne sais pas si tu as déjà entendu parler de ma ligne de vêtements. Enfin bon. J'ai donc pu créer une première ligne qui a fait les podiums, aujourd'hui ça se vend un peu partout dans le monde. Ma boutique est en train de s'ouvrir tout doucement.

Nouveau temps d'arrêt.

- Comme tu te doutes, j'ai quelques mannequins à ma disposition. Mais je manque un peu de personnel masculin. Je trouve que tu corresponds assez bien à mes critères. Je ne cherche pas les modèles pour défiler, juste ceux qui pourraient porter mes fringues pour les séances photo. Alors je voulais savoir, si par hasard, ça t'intéresserait de poser pour moi de temps en temps ? Tu serais rémunéré, bien entendu. Et tu viendrais à la fréquence que tu désires, selon ton emploi du temps, tes envies. On a au minimum un shooting par mois.

Elle avait parlé sur un ton mesuré, ni trop vite, ni trop lentement. Ses yeux n'avaient pas quitté le visage bien proportionné de Cassidy et elle termina sa phrase par un petit sourire interrogateur. Elle espérait qu'il dise oui, bien sur. Mais elle ne lui en voudrait pas s'il refusait, ou même s'il avait besoin de temps pour réfléchir à sa proposition. En fait, elle lui avait demandé ça sans rien savoir de lui. Elle ignorait même s'il habitait ici. Il pouvait très bien être en tournée et être simplement de passage à Thunder Bay. Dans lequel cas, elle pouvait oublier l'idée de l'accueillir au studio.

A présent, il avait son numéro de téléphone. Elle avait pris le risque de le donner à un inconnu. Qui sait, c'était peut-être un beau psychopathe, qui allait finir par la harceler ou lui envoyer des lettres anonymes à l'adresse indiquée sur la carte de visite. Oui, ce genre de pensées prenaient parfois Tatiana, séquelles du centre ou elle a suivi sa cure, probablement...

Elle chassa ces idées inquiétantes de son esprit et se re-concentra sur la discussion qui allait s'entamer.

J'étais encore loin de m'imaginer la scène qui était sur le point de se produire. Je pensais tout simplement que j'avais tapé dans l'oeil de la belle et qu'elle avait peut-être apprécié ma musique. Elle m'affirma qu'elle avait en effet adoré et que la mienne avait su "l'emporter", suivit de quelques félicitations. Voilà de quoi réchauffer le coeur. "Eh bien merci beaucoup, j'apprécie..." Je ne savais pas vraiment quoi dire, je n'avais jamais été habitué à recevoir des compliments sur mes compétences de pianistes. J'en recevais plutôt sur mes prestations sur un terrain de Rugby et je devais dire que jusqu'ici, ça m'avait suffis. Pourtant, son éloge avait eut le don de me faire sourire niaisement.
Je déposais à nouveau mes lèvres dans mon nectar et en bus quelques petites gorgées. Au moins, les écossais avaient le mérite de faire du bon Whisky ! Bien l'unique chose qu'il sache faire correctement. Ce n'était pas pour autant que j'étais fier d'être né en Écosse.
A son tour la jeune femme se présenta. Tatiana. Je trouvais qu'elle portait ce prénom à merveille ! Ce n'était pas vraiment commun dans les alentours et elle semblait tout sauf commune aux autres filles de la région. Appuyé contre le bar je détaillais à nouveau discrètement la jeune femme. Ses vêtements plus particulièrement. Elle était belle ça c'était indéniable, tout comme ses vêtements et ses bijoux. Des bijoux elle en avait d'ailleurs assez mais sans pour autant faire trop bling-bling. Ce que j’appréciais fortement. Pour ma part, j'avais pris l'habitude de ne porter qu'un seul bijoux. Une gourmette, pour continuer dans la catégorie cliché.

La dénommée Tatiana m'avoua qu'elle avait une proposition à me faire. Je haussais un sourcil, déconcerté par ce qu'elle venait de me dire. Mon esprit aux idées tordues n'aidant pas à me faire une idée de ce qu'elle comptait me proposer. Elle mit fin au Suspens assez rapidement en me donnant une carte de visite. La lumière n'était pas très présente au bar mais j'arrivais quand même à lire de quoi il s’agissait. De plus, la jeune femme précisa instantanément qu'elle était styliste ainsi que sa requête.
J'hochais la tête lorsqu'elle m'expliqua pour le lancement de sa marque de vêtements. Ouah ! Ça c'était de la réussite ! Toutefois, j'étais gêné de ne même pas savoir si j'avais déjà acheté l'un de ses vêtements ou même si je connaissais sa marque. A vrai dire, je n'avais jamais fais attention à la marque du vêtement que je m'achetais. Le tout était qu'il devait me plaire. Peut importe le prix, j'étais prêt à mettre beaucoup quand j'en avait les moyen, mais pour ce qui était des marques... Je planais totalement.

"Belle réussite ! Mais je dois avouer que je n'en ai jamais entendu parler... Je ne me suis jamais vraiment intéressé à la mode en fait." déclarais-je embarrassé. Malgré tout, de l'argent était en jeu et surtout, ça serait l'occasion de voir Tatiana un peu plus souvent ? Je réfléchissais à mon emploi du temps de livreur de pizza. Après tout, mes horaires étaient flexibles, je pouvais bien tenter l'expérience. "En tout cas... Ta proposition me flatte énormément ! Je ne sais pas vraiment quoi dire... J'ai déjà un boulot mais mes horaires sont assez adaptables alors ça devrait pouvoir le faire..."

Tatiana venait réellement de me faire plaisir en me proposant de poser pour elle. Certes je ne connaissais rien aux mannequinat mais c'est en faisant que l'on apprend non ? Je sentais l’excitation monter en moi. C'était quelque chose que je n'avais pas ressentis en moi depuis un long moment. Maintenant, j'étais totalement intéressé par tout ce qu'elle pouvait me dire. Je voulais des détails. Je bus une nouvelle gorgé et me retourna vers Tatiana, le sourire aux lèvres. "Et c'est quel genre de vêtement que tu créer en fait ? Et... Ça t'arrive souvent de chercher des modèles dans les bars charmante Tatiana ?"

Après que Cassidy ait accepté sa proposition, Tatiana ne put retenir une expression d'étonnement. La seconde d'après, elle se sentit bête d'avoir haussé les sourcils à ce point. S'en suivit un doux sourire reconnaissant et à la fois satisfait. Elle n'y aurait pas cru, pour tout avouer. Soit il avait vraiment besoin d'argent, soit cette activité l'intéressait réellement. Quoi qu'il en soit, il venait de faire une heureuse.

- Et c'est quel genre de vêtement que tu créer en fait ? Et... Ça t'arrive souvent de chercher des modèles dans les bars charmante Tatiana ?

Tant de questions à la fois qui firent rire la jeune femme. Elle se racla la gorge avant de terminer les dernières gouttes de Martini qui résidaient dans son verre.

- Alors, tout d'abord. Je crée des vêtements qui peuvent être portés par tout le monde. Enfin, je veux dire par là que les prix sont abordables et qu'ils peuvent se porter en rue. Maintenant, je dois avouer qu'il faut avoir son petit style pour pouvoir les mettre. Je les trouve originaux. Je les fais surtout à mon gout, et je m'habille rarement « normalement », si on peut dire ça comme ça. Néanmoins, il m'arrive de créer des habits plus « passe-partout ». Je fais aussi des vêtements plus chics, pour les soirées, les galas... Pour la première ligne, je devais présenter des tenues de rue, donc décontractées, des tenues de soirées, des maillots de bain et quelques autres psychédéliques, comme sur tous les podiums... dit-elle, assez absorbée par son récit.

Elle bougeait ses mains, afin que la communication passe mieux, elle mettait de la vie dans ses paroles, c'était une habitude chez elle. Après, que ça plaise ou non, c'était sa personnalité et on allait pas la lui enlever.

- Une fois que cette ligne là a été présentée, je ne me suis pas arrêtée là, sinon j'allais finir sous un pont. J'ai donc créé des vêtements, tous très différents, que je vendais à la pièce, en modèle unique quoi. C'est pour ça que j'aimerais ouvrir ma boutique. Tous les articles uniques y seraient vendus, et les lignes, avec les affaires reproduits en plusieurs exemplaires continueraient à se vendre dans le monde entier !

Elle se remémora au même moment le jour où ses modèles, habillés et coiffés comme elle l'avait décidé, défilèrent devant des centaines de personnes. Certes, ce n'était pas encore de la haute couture comme on en voit à la télé, mais elle était déjà fière du travail accompli et du chemin que prenait sa carrière. Peut-être que ce défilé allait être le seul et l'unique d'une vie entière. Elle espérait qu'il plaise et qu'il ouvre des portes à un avenir plus grand. Elle se tenait en coulisses, très stressée par l'animation. Tout était timé et rien ne pouvait être laissé au hasard. De la mèche de cheveux bien placée, au bracelets de telle couleur, voire presque au nombre de pas que chaque mannequin devait faire du départ du podium jusqu'au retour. Tat' vérifiait tout, avant de lancer le mannequin sur la piste, et en revenant de celle-ci. Elle avait quelques assistants, quelques professionnels autour d'elle, maquilleuses, coiffeuses, habilleuses, et d'autres gens qui servaient à des détails que je ne citerai pas ici tant la liste est longue, mais elle ne pouvait rien laisser au hasard, et elle priait pour que personne ne tombe, par la même occasion. Elle jetait de temps à autre un coup d'oeil, de par derrière le rideau, au défilé. Elle n'avait pas vraiment le temps mais ça la rassurait, après un moment de rush intense. A la fin, c'était elle qui devait marcher quelques mètres pour se présenter, souriante, au grand public. Une montée d'adrénaline en plus. Bien sur, elle portait l'une de ses créations, unique et faite sur mesure pour elle même. L'une des premières tenues qu'elle avait dessinée seule dans sa chambre, alors qu'elle ne devait avoir que 17 ou 18 ans.

La foule l'acclama à son grand étonnement, elle salua, fit quelques signes, un immense sourire sur les lèvres. Elle ne savait pas trop ce qu'elle devait faire, comment elle devait réagir. Elle ne savait pas si la foule l'applaudissait par politesse ou parce-qu'elle avait réellement aimé son travail. Elle était novice dans ce milieu et elle se contenta de quelques minutes sur le podium, on pouvait lire de nombreux « merci » sur ses lèvres. Elle repartit assez fière d'elle mais tout de même modeste, de peur de devoir descendre de son piédestal assez brutalement. En coulisses, alors que tout le monde s’affairait à tout remettre en place,à vérifier si les tenues étaient complètes, plusieurs personnalités du monde de la mode vinrent féliciter la jeune fille. Elle était très gênée, mais elle garda son sang froid et son fair-play. Elle pu prendre quelques contacts en repartant, et ces personnes ont tenu leur parole durant toute la carrière de Tatiana, ils l'ont aidée dans les moments où elle en eut besoin. Aujourd'hui, certains sont presque devenus des collègues réguliers, qui la soutiennent et l'encouragent, souvent, la conseillent.

- En ce qui concerne ma « chasse aux modèles », je te rassure, je suis loin de faire ça tous les jours. A vrai dire, je préfère même ne pas chercher. Je tombe sur des gens intéressants, je leur propose et libre à eux de me suivre ou non. Mes autres mannequins, je les eu en contactant des agences spécialisées. J'ai recueilli deux ou trois garçons qui s'étaient vus refusés de par leur originalité. Moi, c'est tout ce qu'il me faut. Je choisis quel vêtement va sur quel mannequin.

Tatiana se retourna vers le barman et commanda deux verres.

- Remettez-nous la même chose, s'il vous plaît, dit-elle en souriant finement. Elle reposa les yeux sur Cassidy et enchaîna, j'espère que ça ne te dérange pas de re-boire la même chose...

Le serveur posa les verres pleins sur le comptoir et Tatiana lui tendit un billet avant de récupérer sa monnaie qu'elle glissa dans son sac à main.

En venant ici, je n'aurais jamais pensé repartir avec un nouveau "job". Pourtant c'était le cas. Même pas dans le domaine musical mais dans le mannequinat. J'étais vraiment surpris qu'elle me propose de poser de temps à autre pour elle. Elle ne me connaissait même pas... Je pourrais être un psychopathe qu'elle ne s'en douterait même pas. Quoi qu'il en soit, ce n'était pas le cas, ce n'était pas plus mal d'ailleurs. J'étais tellement intrigué que je me sentis obligé de lui en demander un peu plus sur sa ligne de vêtements.
Elle me fit une longue tirade, m'expliquant ce qu'elle créait, laissant nettement transparaître son ambition et sa soif de continuer à grimper les échelons. Pourtant, elle ne devait pas être bien vieille. Mon âge à peu près... Peut-être un ou deux ans de différence. J'étais très nul pour donner un âge à quelqu'un mais je savais que Tatiana était encore très jeune. Voilà de quoi me faire complexer par rapport à ma misérable vie. Elle avait une marque qui se vendait dans le monde tandis que j'étais un livreur de pizza qui vit encore chez sa timbrée de mère et qui passe son temps libre à jouer aux jeux vidéos. Pathétique. C'était le mot. Toutefois, je tentais de rester la tête haute. Je passais un agréable moment en compagnie de la jeune fille alors autant en profiter. Je me lamenterait sur mon échec une fois chez moi.
La gestuelle apportait en effet beaucoup à ce qu'elle racontait. J'étais tout de suite pris dans ce qu'elle disait et également je sentais à quel point elle était passionnée par ce qu'elle faisait. Elle me faisait penser à moi lorsque je parlais de Rugby : c'était impossible de m'arrêter. Je parlais à un débit probablement exagéré et mes yeux verts pétillaient tellement j'aimais le Rugby.
J'étais un accro à ce sport et je le savais éperdument. Ne plus pouvoir le pratiquer à cause de cette météo totalement ingrate me rendait dingue. Qui sait, peut-être que poser devant l'objectif allait devenir ma nouvelle passion ? Bon j'avais un doute là dessus mais je devais considérer la chose. Je devais plutôt me faire à l'idée que je n'allais plus pouvoir jouer avant un moment et qu'il fallait que je trouve quelque chose pour remplacer ce trou béant pendant quelques temps.

"Ben dis donc... Tu as du bosser dur pour en arriver là déjà ! Bravo !" A cet instant, Tatiana avait toute mon admiration. Cette fille devait avoir un caractère bien particulier pour en être arrivé là si jeune. J'allais d'ailleurs m'abstenir de lui demander son âge. Après tout, on ne demande pas son âge à une Lady. Seulement, j’espérais qu'elle ne soit pas plus jeune que moi, je l'aurait probablement mal vécu.

"Dois-je comprendre que je suis quelqu'un d'intéressant alors ?" Demandais-je en guise de taquinerie. Je ébouriffais les cheveux et termina mon verre, sourire fin collé aux lèvres. Mon verre terminé je pensais que je devais montrer ma reconnaissance un peu mieux que cela. "Plus sérieusement, ton offre me fait vraiment plaisir, je vais tout faire pour ne pas te décevoir" . Et mes promesses je les tenais ! Du moins, j'essayais de les tenir. J'avais juré à Julianna que j'allais lui faire vire un enfer, je m'y tenais toujours après trois ans de vie commune. J'avais promis à June que je me ferais excuser et j'avais bien prévu de la revoir rapidement.
Je regardais la belle Tatiana commander deux nouveaux verres. Je secouais la tête lorsqu'elle me demanda si ça ne me dérangeait pas de reboire la même chose. Oh bien sûr que non, cette boisson était un vrai régale. Toutefois, la voir m'inviter me fit une petit pincement au coeur. Je n'avais pas l'habitude de me faire entretenir et certes, ce n'était qu'un verre... Mais ou ma galanterie était-elle donc passée ?
"La prochaine tournée c'est pour moi" dis-je amusé, sourire en coin et petit clin d'oeil malicieux.

Elle n'avait pas pour habitude d'offrir des verres aux garçons, mais bon. Elle lui devait bien ça après avoir accepté sa proposition. Oui, c'était toujours elle qui se faisait accoster par des gars bien lourds, qui lui offraient des verres qu'elle ne buvait même pas, de près, ou de loin. Quand le serveur se pointe et vous lâche un « du jeune homme là-bas » en pointant le seul type assit... seul au bar. Ce type là, il levait toujours son verre en souriant l'air de dire «  de rien ma belle ». Alors qu'elle n'avait aucun merci en tête. Parfois elle refusait, et parfois, elle se disait que c'était un verre en moins ) payer. Si par malheur le gentleman décidait de lui faire la conversation, elle trouvait toujours un bon moyen de le refouler. Pourquoi tant de désinvolture, me direz-vous ? Et bien... Il faut avouer que Tatiana a un défaut. Je ne sais pas si cela provient de son métier de styliste, mais elle a du mal à sympathiser avec les personnes qui ne lui plaisent pas physiquement. De fait, si la personne n'est pas un minimum belle, présentable, originale ou un temps soit peu stylée, elle a vraiment du mal à faire preuve de sympathie. On le sait, ce n'est pas bien de se comporter comme ça, on sait aussi que la beauté, c'est à l'intérieur, que les préjugés et stéréotypes, c'est mauvais, blablaba. On le sait tout ça. Mais Tat' ne pouvait tout de même pas aller contre sa nature, ses propres ressentis ! Cependant, elle admettait qu'une personne au physique peu avantageux pouvait avoir beaucoup de charme, et que souvent, le charme pouvait suffir.

Deuxièmement, le mal était plus profond, moins superficiel que sa réticence à la laideur (le mot est fort, je sais!). Depuis Kurtis, elle n'avait plus eu aucune relation. Que ce soit intime, amoureuse, ni même sexuelle, en fait. Oui, bien sur elle avait eu des rencards, elle avait embrassé l'une ou l'autre personne, que ce soit en boite ou après un bon dîner. Mais elle n'avait jamais pu aller plus loin que ça, personne ne s'était présenté assez bien, assez intéressant aux yeux de la jeune femme. De plus, elle avait un mal fou à retrouver confiance en les hommes. Il faut bien dire que Kurtis l'avait bafouée, cette confiance. Je crois qu'il ne pouvait pas faire un meilleur cocktails de tous les enfoirés de la terre... Elle se doutait, du moins, elle avait grand espoir qu'ils ne soient pas tous comme ça. Mais elle se doutait aussi qu'elle retrouverait probablement certains défauts fort dérangeants de Kurtis, chez les autres hommes. C'était ça, quelque part, qui la bloquait.

- Et sinon, tu viens d'où ? Il me semble avoir entendu un léger accent. Tu es ici depuis longtemps ? Demanda-t-elle en souriant, buvant à petites gorgées, son verre.

Elle avait cherché en vain d'où pouvait bien provenir cet accent, plutôt joli. Elle n'était pas une grande voyageuse et n'avait pas assez visité de pays pour comprendre ce genre de choses instantanément. Elle aurait opté pour un accent anglais, sans grande conviction.

Soudain, elle ressentit ce qu'elle redoutait depuis le début. Cette gêne en elle, qui annonçait que quelqu'un souffrait. Elle se concentra l'espace de quelques secondes et elle compris que quelqu'un venait de se couper. Elle parcouru des yeux rapidement les mains de Cassidy, remonta sur son visage, il ne tenait rien de coupant. Elle comprit alors qu'il s'agissait du barman. Il avait cassé un verre quelques instants plus tôt, mais elle n'avait rien entendu, probablement trop absorbée par sa discussion avec Cassy'. Elle se tourna vers lui, il semblait ne rien avoir remarqué. Elle fronça les sourcils, comprenant que la douleur n'allait pas tarder à se faire sentir chez le blessé.

-Attention, vous saignez.. votre main.. Dit-elle en pointant du doigt la main droite du serveur.

Il allait tout tâcher, ça aurait été dommage...

Nos nouveaux verres arrivâmes devant nous et j'en bus une nouvelle gorgée après avoir longuement remuer mon petit mélange. Je regardais Tatiana qui elle buvait tranquillement son Martini. Étant jeune, j'avais toujours voulu en boire... Ça semblait tellement cool et exotique. Mais le soir ou j'avais pris ma cuite au Martini... Je l'avais senti passé. Surtout les deux jours qui suivirent. Et depuis... plus jamais je n'en avait bu. Je ne m'en portait pas plus mal. De toute façon, je n'avais pas mis longtemps à remarquer que l'exotisme n'était pas fait pour moi. La pluie et le vent anglais c'était tellement mieux. Et puis... Le soleil n'est pas bon pour la peau, encore moins pour les tattoos alors comme ça, tout allait bien. Au moins un bon point au Canada, je ne risquais pas de choper une insolation à Thunder Bay.
Et sinon, tu viens d'où ? Il me semble avoir entendu un léger accent. Tu es ici depuis longtemps ? Je lui rendais son sourire et me mordais la lèvre aussi. Décidément, cet accent restera handicapant toute ma vie. 13 ans j'avais passé en Écosse ! 13 longues année ! et une fois le calvaire terminé et une bonne vie s'annonçant à Liverpool, qu'est-ce qu'il me reste ? Cet ignoble accent ! Voilà plusieurs années que je n'avais pas remis les pieds en Écosse et pourtant, c'est comme si je ne l'avais jamais quitter. Eh puis ces prénoms Irlandais à la con. Franchement, de ce côté, je n'avais vraiment rien pour moi. Ma mère me détestait déjà avant me^me de m'avoir mis au monde, mais ça... Ce n'était un mystère pour personne.

"Je viens de Liverpool mais l'accent lui... vient d’Écosse." Je bus une nouvelle gorgée, pensant avec grands regrets à mes origines merdiques. "Non je ne suis pas là depuis longtemps... Quelques semaines." Je reposais mon verre pensant cette fois avec regrets à nouveau que c'était dommage qu'il était interdit de fumer dans les lieux publiques maintenant. Je me voyais tellement bien faire le frimeur avec ma cigarette. Mais c'était également parce que tout simplement, j'avais envie de ma dose de nicotine. J'allais survivre. Et la charmante compagnie de Tatiana allait m'aider à tenir. "Et toi ? J'ai vu que sur ta carte, l'adresse était à Thunder Bay... Ça fait longtemps que tu es ici ? "
J'évitais soigneusement de montrer mon dégout pour le Canada. J'avais trop bien vu la réaction chauvine de June envers l'Irlande alors je ne voulais pas retenter l'expérience avec la belle demoiselle qui se tenait à mes côtés. Comme je me l'était dis précédemment, je ne devais pas tout gâcher. Quoi que jusqu'ici, tout c'était plutôt bien passé, pour ne pas dire très bien passé même.
Je m'apprêtais à reprendre la parole, poser une nouvelle question la charmante demoiselle quand soudain elle interpella le serveur, le prévenant qu'il s'était coupé. Je plissais les yeux pour mieux voir mais j'étais loin d'avoir une vue de lynx. Soudain il se retourna et j’aperçus en effet une plaie. Pas très importante mais qui ne devait pas faire jouir non plus.

"Waah... tu es très... observatrice dis donc." lâchais-je sans trop savoir quoi dire d'autre. J'étais étonné. Mais après tout, avec son métier de styliste elle devait probablement être une perfectionniste et remarquer les moindres détails...

Très observatrice, oui, si on voulait. Elle ne comptait pas lui révéler son petit secret et visiblement, il n'avait pas le pouvoir de deviner que les autres en avaient un. Ou alors, il jouait bien son jeu comme Tatiana. Elle aurait du réfléchir avant de parler, avant de prévenir le barman de sa blessure. Mais cela avait été comme un réflexe, quelque chose d'automatique. En fait, avec le temps, elle avait de plus en plus de mal à faire semblant de rien, à garder ce qu'elle ressentait pour elle. C'était tellement désagréable... C'est comme si elle hurlait sa douleur à la place de la personne concernée. Ainsi, il allait se soigner, se mettre un pansement et il n'aurait plus mal, elle non plus. C'était, quelque part, de l'auto-soulagement.

Elle adressa un sourire discret au barman qui s'empressa de lâcher ce qu'il avait en main pour aller couvrir sa coupure. Tat' reprit ses esprit et mit un quart de seconde à se rappeler ce que sa nouvelle rencontre venait de lui demander. Ah oui, depuis combien de temps elle était ici !

- Et bien, pas fort longtemps, mais déjà plus que toi ! Je dirais deux ans environ, peut-être moins. Après mes études je suis venue m’exiler ici. J'habitais dans le New-Jersey, et il n'y avait pas beaucoup de possibilité de carrière là-bas...

C'étaitit vrai. Le New-Jersey, c'est grand. Mais elle habitait un patelin assez retiré de tout, et le centre des autres villes ne lui plaisait pas vraiment. Soit c'était trop bling-bling (un peu comme les candidats de Jersey Shore, ou les girls de Jersey), ou trop rustique. Les habitants là-bas tenaient à leur racines. Et ils restaient au point de départ, sans jamais évoluer. Leurs petites épiceries familiales, leurs échoppes, leur match de baseball le dimanche, toujours les mêmes habitudes. Et surtout, oui surtout, une rivalité incontestée avec New-York. A New-York, elle aurait eu sa chance, encore mieux qu'ici d'ailleurs. Mais... elle avait baigné dans cette rivalité, et bien qu'elle ne partage pas l'avis des habitant de Jersey, elle avait peur. Oui, elle avait peur de mettre un pied à NYC, de voir si les rumeurs se révélaient vraies. Elle avait peur de se lancer là-bas et de se retrouver dans un univers qui ne lui appartenait pas, de se retrouver bloquée pour des années et de devenir comme les New-Yorkais. Du moins, ce qu'on en disait.

Elle aurait également pu tenter sa chance à Los Angeles, ou des villes renommées pour devenir une star. Mais elle n'était pas de ce type. Certes, elle aimait être aimée, regardée, désirée. Elle aimait aussi ce petit succès qui se mettait en place depuis son arrivée à Thunder Bay, mais elle ne voulait quand même pas en arriver au stade d'une people à la une de tous les magazines, sur tous les tapis rouges, et encore moins à lire plus de ragots sur sa vie privée que sur son travail.

C'est alors qu'un jour, elle entendu parler de Thunder Bay, au Canada. Elle était simplement assise au starbucks, en train de siroter son café, attendant une amie de la fac. Les deux personnes parlaient entre elles, précisant qu'il y avait pas mal d'opportunités de carrière là-bas. De plus, la ville n'était pas si loin des Etats-Unis et de quelques grandes villes du Canada. Le Canada.. Elle n'y avait jamais pensé. Pourtant, elle avait toujours rêvé d'y aller. Elle pensait surtout y prendre des vacances, ou s'y acheter une résidence secondaire. Suite à cette petite discussion, elle avait décidé de se renseigner sur la ville et sur divers détails, tels que les loyers, la température qu'il y faisait, quelques coutumes et les rumeurs sur la population. Ce qu'elle avait pu lire lui plaisait, hors mis la température hivernale très basse. Néanmoins, de superbes paysages et plaines où elle pourrait s'adonner à la photo.

C'est alors quelques mois après avoir terminé ses études, diplôme en poche, qu'elle prit son courage à deux mains pour se jeter dans la fosse aux lions, seule, sans réels contacts, juste des valises et un GPS. Aussi, elle avait pris soin de se trouver un appartement sympa avant d'arriver, dormir sous les ponts, ce n'était pas vraiment son truc !

- Et donc tu es écossais... tu te fais à la ville ? Tu t'y plais ? Demanda-t-elle, replongeant les lèvres dans sa boisson.

Aussitôt prévenu, le serveur alla rapidement de soigner. J'étais assez maladroit et j'aurais pu être capable de me couper de la sorte avec aisance. Heureusement pour moi, je n'avais pas à manier des couteaux ou des verres ou tout objet susceptible de couper à longueur de journée. Conduire pour aller livre des pizzas. Depuis les quelques semaines que j'étais ici j'avais faillis me tuer mais également faillis tuer bon nombre de piétions. Je ne m'étais toujours pas adapté à la circulation à droite et surtout aux pluie verglaçante. Conduire n'était donc plus aussi facile pour moi que ça l'était en Angleterre. Je me redressais pour boire mon whisky/red bull puis écoutait la jeune femme me dire d’où elle venait. Le New Jersey... Je n'avais jamais eut l'occasion d'y aller. En fait, je n'avais jamais eut l'occasion d'aller aux Etats Unis alors que c'était l'un de mes plus grands rêves. Ma phobie de l'avion était la principale raison du pourquoi je n'avais pas réalisé ces rêves. Maintenant que j'étais là, que j'avais survécu à la dizaine d'heures de vol, j'allais pouvoir enfin passer la frontière. Quoi que... Il fallait encore que je soit plus confiant au volant parce que... Même si en ligne droite tout se passait bien, arrivé dans une intersection j'étais totalement confus et ainsi devenais un vrai danger public.

"D'accord je vois... N'empêche, au New Jersey, la météo devait être plus clémente qu'ici. " déclarais-je en m'esclaffant. Eh merde... Ma rancœur pour le Canada ressortait. Pourtant j'essayais de me contenir, j'essayais. "A part de la neige ici, je n'ai rien vu d'autre..." Mais ta gueule Cass ! Arrêtes avec tes conneries. J'étais prêt à me faire un dialogue intérieur mais non... Je laissait la voix de la sagesse l'emporter et je pris tout simplement une nouvelle gorgée de mon verre. Lorsque Tatiana souleva le point que j'étais écossais, j'en eux des frissons. Bâtard Irlandais/Ecossais... Comment être encore plus raté ? Tel est la question. Heureusement que la nature m'avait doté d'un physique pas trop mal.

"Eh oui... Je suis écossais donc écoute... Oui je me fais à la ville ! Quand on a vécu en Ecosse aussi longtemps que moi, tout nous semble beaucoup mieux à côté, même si j'ai encore quelques problèmes au niveau du climat et de la conduite..." j'ébouriffais mes cheveux et repris
"Pour tout dire, non, je ne me plait pas vraiment ici. Ton offre depuis que je suis ici est la seule chose de bien qui me sois arrivé je crois bien. Je ne suis pas du genre à profiter des paysages ou autre... Je sais que ça peut paraître un peu crétin et puérile mais moi il me faut des bars partout, des gens avenants. J'ai vraiment l'impression que c'est différent de l'Angleterre, ici. J'veux dire... je ne généralise pas, je suis déjà tombé sur des gens super et surtout ça ne fait pas longtemps que je vis là mais quand même... Oh eh puis le hockey.. n'en parlons pas. Je fais littéralement une overdose de hockey."

Si la bête petite offre de Tat' était une des meilleures choses qui était arrivées à Cassidy depuis son arrivée, en effet, on pouvait bien croire qu'il ne se plaisait pas vraiment ici. Néanmoins, il avait eu rapidement un travail, et bien que ce ne soit pas le travail rêvé, c'était déjà mieux que rien ! De plus, il s'adonnait à la musique, et ça, c'était vraiment cool. Aux yeux de la jeune femme, il avait quand même du mérite ! Mais... d'ailleurs.. Que faisait-il ici, s'il n'aimait pas plus que cela ? Il aurait pu, comme grand monde, opter pour les USA et ses rêves américains à n'en plus finir. Ou bien, peut-être que comme elle, il avait entendu parler des carrières florissantes en ville ? Dans ce cas, son boulot de livreur de pizza devait juste être bon à e financer, le temps de réaliser son rêve...

- Et quelle est la raison de ta venue, alors ? Questionna-t-elle, la main exerçant de petit cercle dans son verre, avec son pic à olive.

C'est alors qu'elle se demanda quelle heure il était, et qu'elle était aussi ici pour parler affaires. Non pas que le jeune homme ne l'intéressait pas, bien du contraire. Mais elle ne pourrait que difficilement collaborer avec lui si elle ne le renseignait pas un peu mieux. Elle saisit tin téléphone. Enfin... Si l'on pouvait encore appeler ça un téléphone. Il faisait un tas d'autres fonctions, comparables à un ordinateur-agenda-bloc notes-cahier à dessins. Bref, une brique, encore plus élaborée qu'un iphone 4s. Et plus utile aussi, bien évidemment.

Tat' n'était pas spécialement fervente des dernières technologies mais si elle devait transporter dans ses micro-sacs, un téléphone, un agenda, un mini ordinateur... Elle ne s'en sortirait jamais. De là, elle consulta son emploi du temps de la semaine, sans perdre une miette de ce que lui racontait Cassidy. Un photoshoot était prévu pour dans une grosse semaine, mais avant ça, il aurait bien fallu que son nouveau petit prodige signe quelques papiers. Convention habituelle afin que tout se passe bien dans le meilleur des mondes, et que personne n'arnaque personne.

En quelques mots, Tatiana prenait en charge les accidents du travail, elle laissait l'horaire assez flexible dans le sens où les mannequins ne pouvant se libérer le jour de la séance photo, ne venaient simplement pas. Elle payait ses modèles par séance et non sur le nombre de jours présents. En d'autres mots, si Cassidy ne pouvait se libérer cette semaine, il n'y avait rien de grave, il n'aurait qu'a revenir à la prochaine séance. De plus, s'il pouvait uniquement se présenter une heure, il passerait dans les premiers et son heure serait payée. Aussi simple que cela ! Les pauses déjeuner étaient prévues dans l'horaire. 3 pauses réglementaires, mais Tatiana n'était pas regardante sur quelques pauses pipi ou pauses clopes. En cas de réaction au maquillage, aux produits divers, elle n'était en aucun cas responsable, les maquilleuses en prenaient la responsabilité totale. Logique, puisque c'est leur travail et que Tat' élabore uniquement la mise en forme, non l'achat des produits. Elle les paie déjà assez cher comme ça !

- Je viens de consulter mon emploi du temps de la semaine, on a une séance mardi prochain, si tu es libre, tu es bien sur convié à venir. Mais avant ça, il faudrait que tu viennes me voir, juste signer ton contrat, donc tu es libre de passer quand tu veux. Même s'il faut, tu peux passer chez moi, ce n'est rien de compliqué, dit-elle en souriant. La séance de mardi commence à 8h du matin, elle se termine probablement entre 18 et 20h, ça dépend de comment on avance. Donc si tu sais venir même une heure, tu peux, ne t'en fais pas. On fera passer les pressés en premier !

Elle saisit un bout de carton sur le comptoir et y nota son adresse personnelle.

- Voilà, si jamais tu ne peux te rendre à l'agence. Passes-moi juste un coup de fil avant, que je m'assure d'être chez moi !

Elle lui glissa le morceau de carton d'un geste tendre, toujours en souriant et rangea son téléphone au passage.

Qu'est-ce que je faisais ici ? Je me le demandais chaque matin, non chaque après midi plutôt, lorsque mon réveil sonnait. C'était désespérant et à vrai dire, c'était quand même la honte d'expliquer qu'à 20 ans, je vivais toujours avec ma mère. Certes, je n'étais pas le seul, j'en étais sûr, mais c'était ainsi. J'aurais pu partir si j'avais voulu faire des études, ma mère m'aurait probablement aidé à financer un appartement ou quelque chose du genre si je devais déménager mais une fois mes 18 ans atteint, j'avais refuser catégoriquement de retourner à l'école, trouvant des petits boulots pour payer le loyer que ma mère voulait que je lui verse et pour toutes mes autres conneries. Oui, la vrai raison de ma venue ici c'était à cause de mes problème d'argent. Je n'avais qu'à dire cela. Après tout, ça donnait un petit côté mystérieux et ça me permettait de ne pas expliquer que je vivais avec de vrais tarés.

"Pour faire simple, c'est à cause de problèmes d'argent on va dire.. Financièrement je ne peux pas déménager en ce moment."

Voilà qui était bien évasif mais qui répondait tout de même à sa question. Satisfait de ma propre réponse, je portais mon verre de forme triangulaire à mes lèvres. Qu'est-ce que c'était bon. J'étais certain de pouvoir boire cette ambroisie toute la nuit. Pourtant, si j'avais légèrement froid tout à l'heure, à présent j'étais parfaitement bien. Probablement l'effet du mélange explosif que je dégustais. Je tenais bien l'alcool, oh oui, je n'avais aucun problème à tenir debout avec trop de verres. Vivre à Liverpool à se faire des soirées bien trop souvent pouvait forger n'importe quel adolescent.
Je remarquais soudainement Tatiana prendre son téléphone, un smartphone qui semblait vraiment smart. Je devais avoir l'air con à côté avec mon petit HTC. Mais je n'étais pas friand de nouvelles technologie. Du moins, pas en ce qui concernait les téléphones. Je réservais mon budget à ce qui était plus d'ordre console de jeu. Honteux à mon âge je sais... Ainsi, ma nouvelle patronne m'expliquait l'emploi du temps de la semaine prochaine. Tout était déjà prévu et semblait parfaitement organisé. Pour quelqu'un d'aussi spontané que moi c'était légèrement déroutant.

"Eh bien écoute... Je pense pouvoir me libérer toute la journée de mardi." J'avais quelques heures à faire à la pizzeria mais je pouvais les échanger avec mon collègue Steven du moment que je le remplaçais un vendredi soir. Oui un mardi contre un vendredi... J'étais bien gentil, mais j'étais vraiment content de pouvoir passer à nouveau du temps en compagnie de Tatiana alors il était hors de question de dire que j'étais pris. Il fallait que je prouve que je pouvais être flexible et digne de confiance. De plus, j'avais à présent l'adresse personnelle de Tatiana. Que demander de plus ? Bon ok, ce n'était pas une raison de plus pour ne pas être galant avec elle. Petit sourire en coin lorsqu'elle me donna le morceaux de papier. "Je n'y manquerais pas !"
Je terminais mon verre et me rendis compte que le martini de Tatiana touchait lui aussi à sa fin. "Je peux t'offrir quelque chose cette fois ?" demandais-je, poli et toujours souriant. Qui sait, peut-être qu'elle avait autre chose à faire et donc plus le temps de boire un verre avec moi ? J'allais être fixé très rapidement.

(Navrée de la taille u_u Je pense qu'on pourrait le clôturer ici ? Comme ça on laisserait place à l'intrigue avec Aber, et envisager un sujet ensemble, plus tard. :) )

Cassidy lui annonça donc qu'il était libre le premier mardi de la séance. Ce garçon semblait un peu trop parait de l'extérieur. Mais bon, il est vrai que pour un premier jour de boulot, ça aurait été triste de déjà manquer le coup. Tatiana n'était pas vraiment sur ce détail, mais elle appréciait néanmoins le geste. Il en était de même pour le rendez-vous administratif. De toute manière, il n'aurait pu commencer le boulot sans toutes les conventions signées.

Depuis quelques années, la jeune styliste avait beaucoup de responsabilités. Elle n'avait jamais aimé ça, mais elle n'avait jamais fuit face au travail. Elle savait qu'on n'avait rien sans rien. Elle avait trimé pour en arriver là, elle avait, certes, la chance d'avoir des doigts de fée mais dans la vie, le talent ne suffit pas forcément toujours. De plus, elle avait des personnes à son service, de qui elle dépendait, et qui dépendaient d'elle. Cela entraînait donc des responsabilités et un certain côté sérieux et exigeant afin de pouvoir gérer une équipe plus ou moins large comme celle de Tat'. Et de jours en jours, cette équipe s'agrandissait, la preuve en était encore là, avec Cassidy.

Elle accordait de l'importance aux lois administratives car elle risquait sa place et celle de ses employés pour un bête petit morceau de papier, c'était dire.
C'est en vidant son verre et en jetant un coup d'oeil à sa montre qu'elle reprit ses esprits. Cassidy lui proposait déjà quelque chose à boire. Elle lui avait promis de le laisser payer la prochaine tournée, mais il était minuit passé, et elle travaillait le lendemain. Ou dans quelques heures, plutôt. Elle se devait donc de rentrer chez elle. Elle l'aurait, une fois de plus, bien invité mais cela aurait été trop prématuré pour le jeune homme, et elle ne voulait pas non plus lui donner l'impression que sa venue dépassait la relation professionnelle. Pas après trois ou quatre Martini tout de même !

Elle sourit elle-même à ses propres pensées, un peu farfelues à cause de l'alcool et replaça son voile sur ses épaules, les couvrant.

- Je suis désolée, je t'avais promis de te laisser payer le prochain, mais je dois y aller... Il est tard et je bosse demain.

Elle lui adressa un sourire charmeur en remettant une mèche de cheveux qui titillait son visage depuis quelques minutes.

- Heureuse d'avoir fait ta connaissance, merci pour le bon son, la bonne ambiance, la discussion et surtout, d'avoir adhéré à ma demande. On se téléphone, on se donne rendez-vous et on se revoit bientôt!

Tatiana s'avança doucement, un pas, pas besoin de plus. Elle tendit ses lèvres rosées vers le jeune homme et embrassa sa joue avec tendresse, répandant ainsi son parfum tout autour d'eux. Elle s'en allât ensuite, toujours sous des bruits réguliers de talons, un sourire aux lèvres et le visage baissé, les yeux à l'affût pour ne pas trébucher malencontreusement et s'étaler comme une m****.